Kokoow's Gaming Blog

Crownstein #4 : compte-rendu du dernier tour et retours sur l'expérience

Dans l'épisode précédent : Crownstein #3

Compte-Rendu : TOUR 4

Menée par Renala, la Maison Ironhart décide de partir à l'assaut du Labyrinthe. Voulant expier les manquements à la bienséance de leur ancien dirigeant Iskandar, les ingénieurs de bataille s'affairent à désarmorcer les bombes qui ont été placées sur les Grandes Portes, alors que le gros de l'armée Ironhart est en proie aux monstres des cavernes.

La Maison Ouranos, toujours positionnée à cet étage leur vient en aide et anéantit les hordes squelettiques qui grouillaient dans les cavernes. Dans la Fôret Enchantée, elle confirme sa position alors que ses éclaireurs filent plus profond.

La Maison Kyzeal continue de dominer la Forêt Enchantée en faisant grossir leurs forces, appelant plus de membres de la Cour à s'allier à eux. La Cour Sylvestre défend son territoire et défait les éclaireurs Ouranos trop près de leur base, réclamant ainsi leur revanche contre l'assassinat supposé de la Prophète Lexya !

Continuant leurs affaires, la Maison Benitez traite le problème de ses auberges récemment sabotées, et revendique une attaque économique éclair sur la Maison Ironhart vulnérable en ville ! La Maison Euryale, fidèle à elle-même, avance dans le secret.

Mais au fond de l'Abysse, ayant joué d'alliances successives, pris des raccourcis dangereux, Aelion, Prince des Voeux, Prophète de la Maison Incarnat, foule le sol d'un endroit hors du temps. Cherchant dans les ombres et les méandres du donjon l'Avant-Poste des Héros Fondateurs de Clarine, il finit par se frotter à un Avatar de la Peur, auquel sa division succombe. Trop tard pour faire demi-tour et repérés, les monstres de l'Abysse convergent vers eux. Le Prophète et sa division combattront jour et nuit, mais finiront par succomber dans l'Abysse après avoir repoussé deux attaques.

L'histoire ne dit pas si les Maisons Majeures finirent par retrouver la Couronne. Les rumeurs parlent même d'un lourd secret, lié à la fondation même du Royaume. Ce qui est sûr, c'est qu'aujourd'hui encore, le Labyrinthe mystérieux est en proie à de nombreuses querelles, alors que le ciel d'obscurcit...

FIN

crownstein-endgame

Alors, heureuse ?

J'ai proposé Crownstein comme une expérience sur 4 tours, avec possibilité de relance sur 4 tours. Le format me semblait honnête car il permettait à la fois de s'investir sur du court terme avec des règles complexes, tout en étant borné dans le temps au cas où l'ennui ou un jeu cassé s'inviterait dans le projet. J'ai recueilli en privé les volontés personnelles de chaque participant de continuer l'aventure : tous on trouvé cela intéressant et plaisant à jouer !

Cependant, trois points saillants ressortent des retours, et je m'ajoute à la voix de ceux qui les ont portés :

Je suis d'accord avec toutes ces critiques. N'ayant actuellement pas vraiment l'envie de les travailler sur cette base (play-by-post, jeu complexe, etc), changer le jeu serait trop drastique et nécessiterait de réapprendre un nouveau fonctionnement, alors j'ai décidé de ne pas relancer la machine pour 4 tours. On ne saura pas qui obtiendra la Couronne, mais peut-être avons nous appris quelque chose d'autre entre temps !

Je remercie infiniment Meno, Zakyel, Cortex, Thornn, JeanDindon et AnthariaJack d'avoir participé à cette lubie qu'il me tenait à coeur d'expérimenter, d'avoir pris le temps pour lire et intégrer des règles compliquées, ainsi que d'avoir eu la curiosité de tester quelque chose qui sort un peu des sentiers battus.

Je suis satisfait de mon battle braunstein ! Je pense que plus de monde devrait faire jouer ce format. Il y a d'ailleurs beaucoup de manières plus simples que Crownstein de jouer plusieurs acteurs (PJs), possiblement en conflit, opérant chacun dans un brouillard de guerre.

De ma maigre expérience, ce qui me semble contraire au concept de braunstein ira plutôt dans le sens des jeux en secrets ouverts (les joueurs connaissent les secrets mais pas les personnages, et les incarnent de cette manière sans en abuser), des jeux sans PvP, ou des jeux "boardgame" où tout le monde voit tout le monde à tout moment. Mais de la même manière que le courant BrOSR a réinventé le Braunstein de Wesely sur la base d'assomptions et de biais personnels, vous parviendrez peut-être à faire fonctionner ses concepts dans votre braunstein, participant ainsi d'un héritage commun de notre passion.

Une confiance aveugle

J'ai une règle en JDR quand je suis joueur : je donne ma confiance. Je fais confiance au MJ sur le fait qu'il saura mener sa barque, et je fais confiance aux joueurs pour compenser en bonne intelligence et participer du bon déroulement de la partie.

Je trouve que la nature opaque des jeux braunstein nécessite d'encore plus de s'appuyer sur ce principe de confiance. La nature PvP assumée du jeu et le fait que les attaques soient secrètes font qu'il est très facile de "prendre la mouche" sur un coup de poignard dans le dos. En format play-by-post avec un temps limité pour proposer leur actions, plusieurs personnes m'ont demandé s'ils pouvaient retarder leurs ordres jusqu'au dernier moment, pour empêcher les autres joueurs d'agir ! Est-ce un exploit ? Je ne pense pas. Je pense que c'est le jeu : tous les coups sont bons pour gagner. Est-ce qu'elle endommage la confiance ? Peut-être, tout dépend de la manière dont on acceuille ces méta-règles.

Graou-graou vs miaou-miaou

En braunstein, il faut une mentalité différente que dans le JDR. Il faut une mentalité de winner. De héros. De main character. Plein de trucs que le JDR conventionnel voit d'un mauvais oeil (le fameux "Main Character Syndrome"). Pire encore ! Il faut faire ce que votre personnage ferait !!! Même si cela implique les pires immondices : si vous ne le faites pas, si vous ne vous battez pas pour vos objectifs, vous ne créez pas les conditions pour créer le drama tant attendu en JDR. Car le drama vient du joueur à côté de vous : celui qui a été muselé pendant des années par du jeu 100% conditionné par le MJ, où les personnages ne pouvait pas devenir les méchants, sans que les joueurs ne deviennent les méchants ! (Allez regarder l'épisode de Community sur ce thème qui est tout simplement génial : S2E14 - Advanced Dungeons & Dragons !!)

En braunstein, ce joueur peut brandir son épée et pourfendre le joueur en face de lui. Tout le monde peut le faire. Et comme tout le monde peut le faire, tout le monde se tient à carreau. Jusqu'à ce que quelqu'un craque, non pas car le vice est en lui... mais parce que le Mage a un maître, qui a besoin de cet artefact. Parce que le Voleur a des dettes. Parce que l'épouse du Guerrier est malade. Le drama était là, devant nous, depuis tant d'années, et on l'a balayé sur le côté parce que le jeu de rôle sur table est le loisir social qui rameute le plus de gens socialement inadaptés.

Les attaques entre personnages étaient ressenties comme des attaques entre joueurs. Ces évènements importants, joués par des ados prépubères, sont devenus des souvenirs cristallisés de leurs égos fragiles. Et ces histoires (parfois sombres, souvent ridicules) sont des légendes que nous nous partageons comme un vaccin contre la maladie de la bêtise humaine.

Sans penser aux effets secondaires sur nos parties.

J'ai dit dans mon premier post que le JDR conventionel avait des allures de chat d'appartement stérilisé. Après un mois de braunstein, j'en suis persuadé : c'est un jeu qui se joue entre lionnes. Des gens résilients, entiers, qui savent prendre et rendre les coups. Des qualités qui ont cruellement manqué à certaines tables que j'ai expérimenté où le PvP était désactivé par défaut, la faute à des "horror stories" où quelqu'un ne savait pas se contenir. J'ai beaucoup meujeuté moi-même en secrets ouverts, sans PvP, pour me prémunir des gens mal adaptés socialement. Mais c'est fini. Je ne peux pas revenir en arrière : Crownstein m'a prouvé qu'une campagne motorisée par les ambitions de personnages qui se téléscopent et finissent par s'affronter est la meilleure campagne de JDR que l'on puisse créer.

Et maintenant ?

Reste à trouver le bon dispositif. Crownstein s'arrête, mais je vais continuer à réfléchir aux braunsteins. Il me faudrait quelque chose de plus direct, qui nécessite moins de travail sur l'organisation et le déroulement des parties. Qui permettent aux joueurs de se retrouver pour jouer ensemble, jusqu'à un certain point ? Mais pour les personnages qui se séparent du groupe, toujours avoir la possibilité de jouer et devenir des antagonistes temporaires. Qui permette l'infinité tactique, mais qui soit en même temps assez indiscutable pour que les joueurs ne se sentent pas frustrés lors d'un arbitrage.

En quelque sorte, une quête épique qui nécessitera des alliés loyaux, combattant des épreuves importantes, naviguant entre les aléas de la vie et leurs passions.

L'histoire se répète. En mi-avril, le premier "Braunstein" de David Arneson, co-créateur de D&D, aura 55 ans. Alors je concluerais cette saga sur Crownstein avec une anecdote de Secrets of Blackmoor, qui résonne d'une manière particulière pour moi à la fin de ce mois :

" Seul un joueur de la << Bande de Blackmoor >> se rappelle du jeu de cartes sous le pont du troll.

Bob Meyer décrit la partie comme étant frustrante pour lui car il n'avait pas d'indication sur la puissance du troll, et à quel point son personnage était fort par rapport au monstre. Il décida d'attaquer le troll seul et se fit tuer en un seul jet de dé car il n'y avait pas de règles pour les points de vie à ce moment, qui aurait pu lui donner une petite chance de survie.

[...] Bob dit même qu'il était tellement déçu de la session qu'il refusa de jouer à Blackmoor pendant quelques temps. Mais l'excitation des autres joueurs pour Blackmoor finirent par le ramener dans le monde imaginaire d'Arneson. Après avoir été la première personne à mourir dans un jeu de rôle, Bob finira par devenir le premier joueur dans un JDR à atteindre le niveau 20 et devenir le sorcier le plus puissant de Blackmoor : Robert the Bald. "


Je continuerai peut-être de poster mes histoires sur ce blog car je trouve l'exercice sympathique et cela me vide un peu la tête. J'espère que l'aventure aura été aussi plaisante à lire qu'elle ne l'a été pour moi à écrire.

Maintenant, allez faire un braunstein.
Regardez Secrets of Blackmoor.
Inspirez-vous de la sagesse des anciens.
Faites rugir ce chat d'appartement.

Bizou, et koud'boul !

zbla